jeudi 22 mars 2007

L'éducation, un droit acquis? Un privilège bourgeois?

Voilà, c'est le premier message de mon blog, et je me suis dit de soulever certains points sur l'éducation, la situation des étudiants, de sortir du chapeau magique quelques chiffres lancés au hasard sur la campagne électorale et d'afficher clairement les valeurs que je trouve importantes dans ma société personnelle.

Premièrement, je dois affirmer que je suis, selon le cadre actuel, considéré comme "à gauche". Pour ma part, je me considérerais comme centriste dans une société idéale, mais le Québec actuel est une société très adroite au niveau de ses prétentions. Je monterai un article bientôt sur le développement durable, et montrerai en quoi nous sommes très hypocrites de considérer nos gouvernement comme venant de "centre-gauche".

Bon, voilà deux paragraphes d'introduction et je n'ai même pas encore présenté ce dont je veux parler. Il s'agit de l'enjeu de l'éducation. Est-ce un bien acquis ou est-ce un privilège?

Pour commencer une argumentation, il faut prendre une position claire sur les définitions. Je considère comme un "bien acquis" quelque chose qui est gratuit et accessible. Un privilège est une chose pour laquelle il faut payer pour profiter de ses avantages.

Or, le système d'éducation coûte de l'argent, au niveau des études post-secondaires comme aux autres. Il faut payer les infrastructures, les employés, les bureaucrates (seul domaine qui n'a pas été coupé à l'UQAM cette année et dont le budget a été augmenté, malgré l'endettement), les professeurs, etc. Le système d'éducation, peu importe comment on le voit, coûte de l'argent. Ce n'est pas un bien acquis, car il faut dépenser pour en profiter.

Comme le système d'éducation n'est pas un bien acquis, il faut savoir comment il est financé. Les étudiants, en ce moment, défraient une petite partie des coûts, mais la majorité du système est payée par le gouvernement, et donc indirectement, par les impôts des contribuables. Cela est du par un principe fort simple: une population éduquée profite à l'ensemble de la société, bien au-delà de profiter à l'individu. En effet, nous avons besoin de médecins, d'infirmiers, de scientifiques qui font progresser la recherche et les innovations technologiques. Les entreprises ont besoin d'employés compétents dans leur domaine, les fonctionnaires ont besoin d'une formation pour bien exercer leurs fonctions et, bien que je doive me retenir de vomir pour le dire, les comptables et les économistes ont même une certaine utilité dans notre société. Donc, l'éducation n'est pas un bien acquis; c'est un CHOIX SOCIAL que notre gouvernement, et donc nous, qui l'avons élu, a pris d'en défrayer la majorité des coûts, afin de rendre l'éducation accessible à une plus grande partie de la population (je ne dis pas "à tous", car à mon avis, seul la gratuité permet d'en faire ainsi. La gratuité scolaire sera un sujet abordé dans un autre message).

En cochant notre bulletin de vote, nous faisons des choix sociaux, sans nous interroger sur les répercutions de ces choix. Je crois avoir montré plus haut que l'éducation n'est ni un droit, ni un privilège bourgeois, et qu'il est accessible à la majorité de la population ayant la volonté de s'impliquer dans des études postsecondaires. L'éducation, c'est un CHOIX DE SOCIÉTÉ, et je crois vivre dans une société qui a choisi de permettre aux gens d'être éduqués sans avoir à s'endetter à outrance ou à être issu de classes aisées pour pouvoir se permettre de suivre des études post-secondaires, si vitales au bon fonctionnement de notre communauté.

Passons maintenant aux chiffres. Je vais faire un chiffre approfondi du dégel des frais de scolarité proposé par le gouvernement libéral.

On affirme actuellement que la hausse représenterait 500 dollars après 5 ans, selon les journalistes, et 2$ par semaine selon le premier ministre sortant, Jean Charest. Cette hausse est qualifiée par celui-ci et ses principaux défendants de "raisonnable". À titre d'étudiant, je tiens à voir si ces allégations sont fondées.

Le programme libéral propose une augmentation des frais de scolarité de 50$ par session, pendant 5 ans. Comme il y a traditionnellement 2 sessions (sans compter le trimestre d'été) d'études par an par étudiant, cela représenterait un total de 10 sessions en 5 ans. L'augmentation est donc, effectivement, de 500$ sur 5 ans.

TOUTEFOIS, là où les journalistes se trompent, c'est en chiffrant ce dégel à environ 26% de hausses de frais. Les journalistes se fient au principe que cette hausse serait de 500$ par année. Malheureusement, cette hausse est, en réalité de 500$ PAR SESSION. La position libérale à ce niveau est claire; il s'agit d'une hausse de 50$ par session et non une hausse de 50$ par année. Comme une session serait d'environ 884$ par année pour 15 crédits, cette hausse de 500$ la ferait monter à 1384$ par session, soit 1000$ de plus chaque année, et non 500. Pour un étudiant qui paierait 1768$ par an en frais, cela représente, non pas 26%, comme le prétendent les journalistes, mais 56,6%.

C'est une hausse de près de la moitié des frais de scolarité (selon les écoles, dépendant des frais afférents de l'établissement) qui est jugée comme étant "raisonnable" par le Parti Libéral du Québec. Voyons maintenant les affirmations de M. Charest.

"Une hausse de 2$ par semaine". Sauf que cela ne s'appliquerait qu'à la première session. À la deuxième session, la hausse par rapport à la situation actuelle serait de 4$, à la troisième, de 6, etc. À la fin, cette hausse de 1000$ représenterait des dépenses additionnelles de 19,23$ par semaine, soit environ 2h30 de travail supplémentaire au salaire minimum pour les étudiants déjà surendettés.

La solution de Jean Charest? Hausser les prêts et bourses. L'endettement étudiant, déjà très élevé, devrait donc augmenter, et ses standards devraient être revus, car il est faux de dire qu'une famille qui fait des revenus de plus de 40 000$ par an peut vraiment permettre à son enfant de venir étudier à Montréal (ou une autre ville), de payer 2768$ par an en frais de scolarité, ainsi que ses dépenses habituelles (livres, transport, nourriture, appartement, vêtements, etc.) sans se serrer la ceinture jusqu'à l'étranglement. De plus, ce ne sont pas tous les étudiants qui sortent de l'université avec des perspectives d'emplois rentables. Les historiens et les professeurs, qui peuvent faire des revenus de 35 000$ par an, ont déjà bien de la difficulté à rembourser les 10 000$ d'endettement de leurs études, pour pratiquer le métier qu'ils aiment (sans compter que les intérêts s'appliquent sur les 3 années d'étude, une fois le délai de 6 mois après les études passé, comme pour une carte de crédit qui offre "ne payez rien avant 3 mois" et qui facture des intérêts sur ces 3 mois si vous ne payez pas avant).

La proposition de Jean Charest nuit à l'accessibilité aux études post-secondaires, et cela est un fait. Elle nuit aussi à la situation déjà difficile des étudiants "carrément dans le rouge" qui paient déjà beaucoup, compte tenu que la majorité d'entre eux travaillent au salaire minimal pour payer leurs études, à des emplois saisonniers ou à temps partiel, sous le seul de la pauvreté (environ 12 700$).

J'ai dit plus haut que l'éducation accessible était un choix de société. Le choix que propose le Parti Libéral du Québec cette année est aussi un choix de société: celui de faire payer plus cher aux étudiants pour une éducation (ne nions tout de même pas les investissements que le PLQ veut faire dans l'éducation post-secondaire) de meilleure qualité, mais plus difficile d'accès. Ce document n'a pas pour but de dire qu'il ne faudrait pas voter PLQ, mais que si vous le faites, vous devez être conscient du choix que vous faites. Personnellement, je crois en une éducation accessible et de qualité, et je crois que c'est le choix de société que les Québécoises et les Québécois veulent faire. Nous verrons ce qu'il en est lorsque ceux-ci iront poser leur croix sur leur bulletin de vote.

5 commentaires:

Anonyme a dit...

Mais qu'est-ce donc cette mentalité de génération passe-partout? Nous autre, ont les payais nos études et crois moi, il y avait pas mal de monde en train d'errer sans but dans les cégeps et les universités. Nous nous en allons directement vers une crise de la main d'œuvre non spécialisé alors que les universités sont des usines à produire des chômeurs. Le Québec à atteint sa capacité à payer!!! Fini le temps de l'état providence, il faut payer pour nos services.

Manx a dit...

Mmmh... Passe-partout a du nous traumatiser fort dans ce cas. Je n'ai pas dit que les frais étaient impayables, note-le bien, même si je me suis placé en faveur de la gratuité scolaire. Et ce n'est pas parce qu'on paie ou ne paie pas qu'il n'y aura pas de gens qui errent sans but dans les cégeps et universités. Ce que je dis est que c'est un choix social que les Québécoises et Québécois ont fait en voulant d'une éducation abordable et de qualité.

Le Québec a atteint sa capacité à payer? Répète-moi ça pour voir. Dans le budget Charest, on prévoir une baisse d'impôts de 1,25 milliards, plus les 700 millions promis pour la péréquation. 1,9 milliards au total de la "capacité à payer" du Québec, alors que le dégel de 1000$ par an n'est ni (à mon avis) "raisonnable". Si la main d'oeuvre n'est pas spécialisée, ce n'est pas en restreignant l'accès aux études post-secondaires par des mesures économiques que les choses s'amélioreront.

Je dis pas que nous autres on les paye pas nos études, mais que pendant que certains respirent mieux devant les promesses libérales, d'autres s'étouffent.


Si la priorité du Québec adulte et maintenant diplômé est de baisser SES impôts et laisser les frais de scolarité augmenter sous prétexte qu'eux aussi les payaient, mais de 1000$ moins cher, je me demande, honnêtement, qui est celui qui veut obtenir tout cuit dans le bec.

PJF a dit...
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
PJF a dit...

Merci pour les commentaires que vous avez écrit sur nation montrealaise.org.

Je suis bien d'accord avec votre point que Montréal ne pourrait survivre, dans le contexte actuel, comme une Cité-État comme le fait Singapour par exemple.

Mais comme le mouvement souverainiste québécois (qui a grandement aidé à moderniser et urbaniser le Québec), peut-être qu'un mouvement nationaliste montréalais enverrait un signal clair que la métropole (où la pauvreté est la plus élevée au Québec) ne veut plus se faire manger la laine sur le dos par un système électoral qui favorise les régions.

Au plaisir

Anonyme a dit...

manx président!