vendredi 29 juin 2007

Pourquoi vénérons-nous notre auto?


(Cette image vient d'un parking à New York)

Question fort importante à se poser au sujet de l'automobile: pourquoi la vénérons-nous? Je tiens à écrire ce billet, bien que je sache fort bien que plusieurs personnes qui lisent mon blogue ne roulent pas beaucoup. Alors à défaut de changer les choses, peut-être arriverai-je au moins à changer des mentalités ou à vous soulever quelques questionnements.

Premièrement, voyons le cas de l'auto actuellement. L'automobile Québécoise est parfois petite, mais ces dernières années, on voit de plus en plus de VUS sur le marché. D'un autre côté, une technologie de moteur hybride (quelquefois installée dans des VUS... ce que j'ai toujours trouvé douteux) a aussi été lancée récemment et commence, à très petite échelle, à se faire voir dans les parkings. Le coût semble être le principal élément dissuasif à l'achat de ces automobiles. Quand on sait que le moteur est responsable de 10% du coût de production, on se demande d'ailleurs pourquoi ces automobiles coûtent 10 000$ de plus. Un autre véhicule est apparu récemment sur nos rues: le Hummer. Cet "auto" à forme de camion est un ancien prototype de l'armée et consomme 25l/100km. Quelques Montréalais se le sont procurés.

Il faut aussi parler du carburant de l'automobile. Le transport consomme 50% du pétrole du monde. Il y a 3 ans, il y a eu une grande vague d'inquiétude lorsque son prix au litre a dépassé le dollar. Depuis, il n'est pas surprenant de le voir grimper à 1,30$ durant les périodes de forte demande. Un an après la vague d'inquiétude sur la possibilité de hausser le prix au-dessus de 1,00$/l, ce prix était devenu normal. Il faut aussi savoir que dans le moteur, seulement 15% du pétrole du réservoir est transformé en énergie pour avancer; le reste se disperse en chaleur. Les gaz relâchés par le pot d'échappement sont, par exemple, le monoxide de carbone, dyoxide
de carbone et le monoxide d'azote (les 3 plus grands composants du smog urbain, après l'ozone), pour ne nommer que ceux-ci. L'efficacité du moteur est donc l'une des pires! Un foyer de chauffage convertit 40% de son énergie en chaleur, pour les moins efficaces.

Voilà donc quelques données sur l'impact environnemental de l'auto. Je crois que je vais passer à une analyse plus économique.

L'industrie Québécoise ne profite pas de l'auto. Nos voitures proviennent soit d'Ontario, soit du Mexique. Pour le Québec, nos retombées économiques équivalent à zéro.

L'industrie Québécoise ne profite pas du marché des pièces d'automobiles. À ma connaissance, nous ne faisons aucun pneu et peu de nos entreprises ne vendent des pièces aux magnae de l'automobile. Total des retombées économiques: à peu près 0.

L'industrie Québécoise ne profite pas de l'industrie pétrolière. La preuve: nous ne l'utilisons même pas pour produire de l'électricité. Il y a 20 ans, des agents économiques (bien avant que l'on ne se soucie de l'environnement) ont jugé qu'il était plus rentable de faire des barrages à 1000km au Nord de nos habitations qui consomment de l'électricité que d'ouvrir des centrales à énergie thermique. Et ils avaient raison! Nous avons maintenant, suite aux hausses du prix du barril, l'électricité la moins chère d'Amérique et fournissons de l'électricité jusqu'à New York, en période de pointe.

Le Québec n'a pas découvert de gisements exploitables de pétrole. Nous avons une raffinerie à Pointe-aux-Trembles. Un des employés m'a d'ailleurs confié que si on savait la moitié de ce qui s'y passait, cette raffinerie fermerait. Bilan économique du pétrole au Québec: une raffinerie. Au total, en éliminant les petites retombées, c'est aussi la totalité du bilan économique du Québec pour tout le marché de l'industrie automobile, des pneus aux pièces, de l'assemblage à la consommation de carburant. Une raffinerie.

Passons à l'aspect social. D'abord, selon l'OMS, les accidents de la route sont responsables de 2,2% de la mortalité mondiale. L'auto tue 650 Québécois par année et 3000 canadiens. La guerre en Afghanistan nous a fait pleurer la mort de 60 soldats, depuis 2001. Pendant ce temps, on a tué pas moins de 15 000 personnes sur les routes du Canada, dont 3250 au Québec. Sans calculatrice, c'est 250 fois plus.

L'automobile est doublement responsable du phénomène de banlieusardisation de la couronne de la ville de Montréal.

D'abord, la banlieusardisation rend nécessaire l'utilisation de l'automobile, voire de deux chars. Cela permet aux gens d'aller faire des achats ou d'aller travailler, souvent dans la ville principale. Donc, l'auto rend la banlieue accessible.

La seconde raison vient des motifs pour lesquels on habite en banlieue. Oui, il y a des raisons économiques, mais elles sont bien faibles quand on voit la dépense que l'on doit faire pour le char, l'essence, etc. Les motifs dont je parle sont ceux de sécurité, de verdure et de tranquilité.

On craint la sécurité en ville en partie à cause des "gangs de rue", pourtant rares à Montréal, mais surtout pour la sécurité de nos enfants lorsqu'ils traversent la rue. On a peur qu'une auto les écrase.

Ensuite, on cherche la tranquilité, loin du bruit et de l'achalandage de la ville, le bruit étant causé par... les voitures!

Finalement, on cherche la verdure alors qu'en ville, on a du remplacer celle-ci par la route nécessaire pour faire circuler les automobiles.

Au final, de ces 3 raisons, l'automobile est la raison principale ou la seule responsable du problème. Pour aller plus loin, 44% des habitations de Montréal n'ont pas d'auto. Les causes de cette automobilisation de la ville, qui nuisent à sa sécurité, sa tranquilité et à l'accès à des parcs pour les Montréalais vient en fait des automobiles qui viennent en bonne partie de la banlieue (où les habitations ont presque toutes 2 autos ou plus), lieu où les gens vont pour fuir les problèmes causés par l'automobile!

En dernier, il ne faut pas oublier que plus les gens vont s'installer en couronne, plus il faut construire de nouvelles maisons loin de Montréal. Les urbanistes estiment qu'actuellement, les nouvelles maisons sont construites en moyenne à 36 km de la ville de Montréal. Pour quelqu'un qui travaille au centre-ville, cela fait 72km par jour, 300 jours par année, soit 21 600km/an. Uniquement pour se rendre au travail. Avec ces conditions, mieux vaut prendre une garantie 5 ans, plutôt que 100 000 km.

En conclusion, l'automobile, au niveau environnemental, est un fiasco. D'un point de vue économisuqe, le marché Québécois est très limité. Au niveau social, l'automobile tue 250 fois plus que la guerre en Afghanistan et est responsable de la banlieusardisation, de la dégradation de la qualité de vie à Montréal et de longs déplacements pour les tâches les plus simples, comme le travail. L'environnementaliste, l'économiste et le sociaologue arriveraient donc à la conclusion suivante, de 3 façons différentes: l'automobile n'est pas bonne pour le Québec.

Poussons même le débat un peu plus loin. L'an dernier, Jean Charest a suscité la controverse quand il a appuyé un contrat pour de nouveaux wagons offert sans appel d'offre. Le contrat a été octroyé à Bombardier par la STM, à la grande frustration d'Alstom. Le but de Jean était de créer des emplois au Québec.

Justement! Attendu que l'industrie automobile ne crée presque pas d'emplois au Québec, pourquoi n'irions-nous pas prendre le virage du transport collectif? Nous avons le siège social de la compagnie qui construit le plus de nouveaux tramways au monde: Bombardier. Elle a créé le tramway de villes comme Munich, ainsi que le monorail de Las Vegas. Mais à Montréal, dans le province où cette compagnie a vu le jour, elle rénove un réseau de métros... Pourtant, des villes commer Sherbrooke, Québec et Montréal bénéficieraient de l'amélioration de leur réseau de transport en commun. Les tramways de Bombardier font la fierté des villes qui l'ont choisi; il est silencieux, rapide, beau et confortable.

Poussons la coche d'un cran et favorisons un meilleur transport interurbain. Je me rappelle, l'an dernier, moi et ma blonde pouvions nous rendre de Montréal à Berthier en bus pour 10$, directement, 2 fois par jour. De là, on pouvait se rendre chez ses parents. Depuis, le trajet de bus a été annulé. Pour le remplacer, on peut prendre le bus Montréal-Repentigny, Repentigny-Joliette et Joliette-Berthierville. Pour un prix 3 fois supérieur, on peut déarquer à Berthier avec un bus d'Orléans-Express, qi fait le trajet Québec-Montréal.

Si vous allez en France et faites le trajet Paris-Lyon en auto, on vous traitera de fou, voire d'idiot. Prenez le TGV, c'est non seulement plus rapide, mais ça revient aussi moins cher. C'est plus confortable et calme que votre voiture. Ainsi, au Québec, il faudrait 1h58 pour faire Montréal-Toronto en TGV et 48 minutes pour Montréal-Québec. L'expertise de Bombardier en transport sur rail pourrait aussi nous aider à réaliser un tel projet, alors que la tendance va déjà s'élargir au train à lévitation magnétique. Il serait donc avantageux socialement, économiquement et meilleur pour l'environnement de créer de tels projets et de renforcer le transport en commun urbain ET interurbain. C'est ça, le développement durable que devraient prôner nos élites politiques!

8 commentaires:

Renart Léveillé a dit...

Je n'ai pas de voiture et espérerais ne jamais en avoir, sinon au moins électrique, mais je crois que je devrai être un pollueur de plus...

Anonyme a dit...

L'automobile est le symbole même de l'individualisme et le véritable premier produit de consommation de masse du capitalisme industriel. Il sera alors difficile de changer les mentalités et de favoriser le transport en commun. Mais je l'espère.

Avec le tarissement des réserves de pétrole et les effets néfastes du moteur à explosion sur l’environnement, il est possible dans l'avenir que de nouvelles sources d'énergie motrice comme l'hydrogène, par exemple, ou l'implantation de réseaux de transport en commun finissent par s'imposer.

Renart Léveillé a dit...

Et on se croise les doigts!

Manx a dit...

L'automobile à hydrogène n'est pas une alternative encore envisagée sérieusement par les compagnies. Les industries automobiles investissent 8 fois plus dans le design de leurs automobiles, l'augmentation de la puissance du moteur (malgré la limite de conduite) et d'une voiture de plus en plus "sportive" que dans la recherche de la pile à hydrogène.

Le problème, c'est qu'au Québec, cette dépendance à l'auto est un gouffre économique, social et environnemental. Et on en redemande encore. On veut construire et prolonger des autoroutes supplémentaires, et on ne se demande pas quelles en sont les retombées finales.

En économie, quand un marché ne rapporte pas à l'état, on tente d'y trouver un remplacement. Au Québec, les citoyens ont peur d'aller chercher plus loin. Même des villes comme Dallas ont maintenant un réseau de tramway. Munich, capitale de la BMW, a un tramway Bombardier. Montréal, siège social de Bombardier, a une population qui y est réfractaire. C'est le moment de commencer à créer un marché qui puisse remplacer une partie de nos déplacements comparé à l'auto, parce que ce marché nous nuit plus qu'il ne nous aide.

Anonyme a dit...

J'aime bien encore une fois entendre la faute mise sur ses banlieusards. L'environnement certes, mais sans confusion des genres.

On blâme à tort et à travers la voiture comme symbole de la pollution. Pourtant, un modèle comme la volt consomme 1.5 litre au mille kilomètres existe déjà depuis plus de 10 ans. On blâme la voiture, mais le moteur qu'on nous vend, qui est le vrai problème. On blâme le consommateur de ne pas faire des choix écologiques dans l'achat de leur véhicule alors que c'est l'absence ou le coût faramineux qui décourage les gens. On blâme la banlieue en oubliant de blâmer les entrepreneurs qui s'installent tous à Montréal, endroit où une petite piaule mal située vaut plus d'un demi-million.

Ahhhh mais utilisez le transport en commun dites-vous. Le métro est peut-être rendu à Laval, mais il me prend quand même plus d'une heure et demie pour me rendre à mon travail en transport en commun comparativement à 20 minutes en voiture. On parle de 500 heures perdues dans une année...

Améliorons le transport en commun alors! Prenons les solutions géniales de la France, par exemple le TGV et importons-le ici. Après tout, le fait d'avoir 3 fois plus de superficies à couvrir pour 7 fois moins de population ne change rien au calcul de la rentabilité d'un tel projet! Pourtant, il suffit d'un peu de recul pour savoir que le sujet a été abordé plusieurs fois sous plusieurs angles ici au Québec et à chaque fois le constat est le même. Non seulement le coût est largement au-dessus de nos moyens, mais le climat du Québec rend cette technologie un fiasco à long terme. Nous sommes incapables de tenir une route sans trou pendant plus d'un hiver et nos trains déraillent à des vitesses de 30 km/heure de manière régulière. Un TGV? Non merci, je préfère vivre!

Manx a dit...

Mmmh... Je pense que tu n'as pas lu la totalité de l'article. Je parlais bien sur du développement durable de l'automobile, non pas seulement de l'aspect environnemental.

Notre superficie est plus élevée que celle de la France et notre bassin de population plus grand. Maintenant, comparons des pommes avec des pommes... La Suède est un pays avec un bassin de population ressemblant fort bien avec le sud du Québec, la partie habitée.

Voici une carte des trains de Suède.

http://www.esri.com/news/arcnews/fall03articles/fall03gifs/p35p2.jpg

Je m'excuse de l'échelle de la carte et du bleu à gauche (cela vient d'un article traitant de Tchernobil, on y montre le développement des chemins de fer pour montrer le bassin de population et sa répartition dans le pays).

La capitale, Stockholm, comporte 770 000 habitants. Son comté en compte un total de 1,9 millions. Celle de Montréal compte 1 600 000 personnes sur l'île et près de 3,3 millions en incluant la couronne. La densité de population de Montréal est de 4500hab./km²; celle de Stockholm est d'un peu plus de 4200. Elle est reliée aux nombreuses villes de Suède, comme Malmö et Göteborg. Étrangement, au niveau de ces deux villes, on peut faire un parallèle au niveau de la distance (légèrement supérieure au Québec, car Göteborg et Malmö sont plus ou moins rapprochées l'une de l'autre) entre Montréal, Québec et Sherbrooke. Québec a une population de 20 000 personnes de plus que Göteborg, Malmö a environ 60 000 personnes de plus que Sherbrooke. Au final, le cas est plutôt similaire au nôtre.

Loin de prôner une ère ferrovière s'apparentant à celle de la Suède, il y aurait par contre de grands avantages à avoir un TGV Montréal-Québec-Sherbrooke, trois villes à voyagement assez fréquent, à moins de 300 km, représentant dans sa région une population qui doit dépasser le 4 millions de personnes.

Pour le transport de la banlieue à Montréal, le problème va dans l'absence d'alternative très efficace. Si aucun mode de transport en commun n'est efficace et ne peut se comparer à l'automobile, normal que les gens prennent l'auto. On est en train de construire un réseau de métro qui s'étend à 6 km de Montréal, mais notre étalement urbain fait 36km de rayon; on ne peut pas compenser cela. Les réseaux de transport en commun ne sont pas capables d'accomoder les couronnes, à cause de l'éloignement et de la superficie des maisons (ce n'est pas un reproche, mais une constatation). Il faudrait surtout trouver un moyen d'inciter les gens à passer en ville (au moins en ville) sans utiliser leur voiture. Avoir un transport en commun efficace est une des solutions. Elle permet de développer le marché de Bombardier et permet de réduire les accidents en ville. La perspective dont je parle pour les transports et l'abandon du char n'est pas dans une perspective strictement environnementale. Elle est expliquée par une diminution de notre économie, une perte de possibilités d'ouvertures de marchés qui nous seraient profitables, et sérieusement profitables. Elle parle aussi de développement social, par une création d'emplois majeure et l'amélioration de notre réseau de transport. Et encore là, à l'extérieur de la ville, l'automobile s'avère nécessaire.

D'ailleurs, on peut entretenir nos routes partout au Québec, sauf à deux places: sur l'autoroute et à Montréal. Ailleurs, nous avons d'assez bonnes routes. La solution? Pas d'investir plus dans les routes, mais bien d'investir plus dans des moyens de remplacement à la route. Si on lance un TGV Montréal-Québec, la 40 sera en meilleur état, et je te le garantis, au bout de 5 à 10 ans, parce qu'elle sera moins fréquentée. Si on crée un réseau de transport en commun efficace dans Montréal pour diminuer son ratio de voitures, l'état des routes ne se dégradera pas à un rythme aussi effarant, et on pourra donc arriver à réparer la route au même rythme qu'on la détruit.

Manx a dit...

Gnarf, mon lien est trop long...

Copier/coller ces deux demi-liens
http://www.esri.com/news/arcnews/
fall03articles/fall03gifs/p35p2-lg.jpg

Maxime a dit...

C'est un cercle vicieux, surtout en région, comme moi, qui vit à Trois-Rivières : le transport en commun est sous-financé car il n'est pas assez utilisé. Le sous-financement crée beaucoup de contraintes qui laissent le réseau peu développée. Cette faiblesse du développement rebute de nombreuses personnes qui ne veulent pas utiliser le transport en commun en raison des horaires peu pratiques. N'utilisant pas le transport en commun, il demeure sous-financé.

À quand un projet collectif de transport en commun ? Nous l'attendons toujours.